Lettre à Noirmoutier
Chaque vendredi, à la sortie du collège, je traînais mon sac trop lourd jusqu’à la gare routière. Les autres prenaient leurs vélos, rejoignaient leur quartier, disparaissaient. Moi, j’attendais l’autocar. C’était toujours le même, un véhicule bleu et blanc un peu fatigué, qui empestait le gasoil et l’usure. À l’époque, je n’aimais pas particulièrement l’autocar. Il faisait chaud l’été, froid l’hiver, et l’odeur du plastique chauffé par le soleil me donnait mal au cœur. Mais il me ramenait à toi. Et c’était tout ce qui comptait. Je m’installais au fond, côté fenêtre. Pas pour me cacher, non. Mais pour mieux voir défiler le monde. La ville s’effaçait lentement : immeubles gris, ronds-points, parkings, centres commerciaux... puis les routes s’élargissaient, les champs reprenaient leurs droits. Les noms des villages me devenaient familiers. Un à un, ils formaient un chapelet de promesses : Bouin, Beauvoir-sur-Mer… La mer se rapprochait. Le trajet durait plus d’une heure, parfois deux avec ...